Droit du sport

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Jeux de hasard, paris

Jeux de hasard, paris

C.J.C.E., arrêt Her Majesty’s Customs and Excise c. Gerhart Schindler et Jörg Schindler, 24 mars 1994, C-295/92.

La High Court of Justice of England and Wales a posé plusieurs questions préjudicielles à la Cour de Justice de l’Union européenne concernant un litige portant sur des billets de loterie.

Ce litige opposait les commissaires des douanes et accises avec Monsieur Schindler.

Monsieur Schindler avait envoyé des publicités et des bons de commande de billets de loterie de la République fédérale d’Allemagne. Ceux-ci avaient été confisqués par les commissaires à Douvres sous le prétexte qu’ils allaient à l’encontre de la loi de 1898 concernant les douanes. Cette loi disposait, en son article 1er que : « Est interdite, l’importation des articles suivants:

  1. i)  …
  2. ii)  tout matériel publicitaire ou tout document annonçant ou concernant le tirage ou le projet de tirage d’une loterie destiné, selon les commissaires des douanes et accises, à être diffusé auprès du public au Royaume-Uni, en violation de toute disposition légale relative aux loteries ».

La High Court of Justice avait été saisie afin de valider la confiscation des plis. Monsieur Schindler avançait que les lois invoquées par les commissaires étaient incompatibles avec des dispositions du TCEE concernant la libre circulations des marchandises. En réponse, les commissaires ont indiqué que les billets de loterie ne pouvaient être considérés comme des marchandises.

Les questions préjudicielles étaient les suivantes :

  • Les billets de loterie sont-ils considérés comme des marchandises au regard de l’article 30 du TCEE ou s’agit-il de services au sens de l’article 59 du TCEE ?

La Cour répond que même s’il s’agit uniquement de l’envoi d’objets matériels (billets de loterie, formulaires, publicités) on ne peut les détacher de l’activité de loterie. La Cour considère donc que ce sont des services et non des marchandises.

  • Si oui, l’article 30 s’applique-t-il au cas présent vu qu’il n’y a pas de discrimination fondée sur la nationalité ? Si oui, une justification est-elle possible au regard du critère d’ordre public ?

La mesure s’applique tout autant au Royaume-Uni qu’aux autres Etats-membres. La Cour ayant établi qu’il ne s’agissait pas de marchandises, ces questions devenaient sans objet. La loi de 1898 concernant les douanes ne s’applique pas.

  • Y a-t-il une application de l’article 59 TCEE alors qu’il n’y a pas de discrimination sur la nationalité dans le cas d’espèce ?

La Cour conclu par l’affirmative en ajoutant qu’il s’agit d’une entrave à la liberté de service.

  • Si oui, la mesure est-elle justifiable au regard du critère d’ordre public ?

La Cour dit que l’interdiction ne vise pas tous les types de loterie. L’interdiction est inscrite dans une législation plus large sur les jeux d’argent qui autorisent les pronostics pour les matchs de football et les jeux appelés « Bingo ». Cependant, ces types de jeux ne s’apparentent pas à de la loterie. Leurs règles, objets, modalités d’organisations diffèrent. Ces jeux  ne sont pas comparables à la loterie interdite dans le cas d’espèce. La Cour, estime que les législations misent en œuvre par les commissaires sont compatibles avec l’article 59 du TCEE. Cela se justifie eu égard aux raisons impérieuse d’intérêt général.

C.J.C.E., arrêt Questore di Verona c. Diego Zenatti, 21 octobre 1999, C-67/98.

Le Conseil d’Etat italien a posé une question préjudicielle à la Cour de Justice de l’Union européenne.

Le litige concernait Monsieur Zenatti qui était l’intermédiaire d’une société de paris sportifs entre le Royaume-Uni et l’Italie. Celui-ci avait reçu une interdiction d’exercer son activité de la part du préfet de Vérone.

Cette interdiction était basée sur l’article 88 du décret royal portant approbation du texte unique des lois de sécurité publique. Cet article dispose qu’aucun agrément ne sera délivré pour la collecte de paris sauf pour ce qui concerne les paris sur les courses, régates, jeux de balle/ballon et autres compétitions du même genre « quand la collecte des paris constitue une condition nécessaire au bon déroulement de la compétition ». En l’occurrence, Monsieur Zenatti ne pourrait pas bénéficier d’un agrément pour les services qu’il preste.

La question préjudicielle liée à ce litige était la suivante : « les dispositions du traité relatives à la prestation des services font-elles obstacles à un régime tel que prévu par la réglementation italienne sur les paris, eu égard aux préoccupations de politique sociale et de prévention des fraudes qui le justifient ? ».

Autrement dit, le décret italien sur les paris contrevient-il à la libre prestation de services (au sens du droit communautaire) ?

La question sous-jacente était donc de savoir si les paris sportifs étaient assimilables à des billets de loterie et donc si l’arrêt Schindler répond déjà ou non à la question préjudicielle.

La Cour a répondu à cette question par l’affirmative car les deux jeux d’argents comportent des caractéristiques comparables telles que l’espérance de gain en argent, les risques de fraude et de délit et les conséquences individuelles et sociales dommageables.

La Cour souligne tout de même deux distinctions entre cet arrêt et l’arrêt Schindler.

  • La portée des deux législations invoquées par les autorités est différente. Dans cet arrêt, nous sommes face à une interdiction partielle alors que dans l’arrêt Schindler, l’interdiction est totale.
  • Dans l’arrêt Zenatti, les dispositions sur la liberté d’établissement pourraient s’appliquer compte tenu des relations existantes entre Monsieur Zenatti et Overseas. Overseas est la société pour laquelle Monsieur Zenatti travaillait. Cette deuxième distinction est intéressante mais pas indispensable car elle ne fait pas l’objet de la question préjudicielle.

La Cour conclut que le litige relève bien de l’article 59 du TCEE et elle considère que les mesures restrictives comprises dans la législation nationale sont justifiées par des raisons impérieuses d’intérêt général car « elles sont propres à garantir la réalisation de l’objectif qu’elles visent et si elles ne vont pas au-delà de ce qui est nécessaire pour l’atteindre ».

Il ressort que l’objectif recherché par les autorités italiennes est identique à celui de l’arrêt Schindler. Les dispositions du traité sur la libre prestation de services ne s’opposent pas à la législation nationale car celle-ci est justifiée et respecte le principe de proportionnalité.

C.J.C.E., arrêt Markku Juhani Läärä, Costwold Microsystems Ltd et Oy Transatlantic Software Ltd c. Kihlakunnansyyttäjä (Jyväskylä) et Suomen valtio (Etat finlandais), 21 septembre 1999, C-124/97.

La cour d’appel de Vaasan (Finlande) pose une question préjudicielle à la Cour de Justice de l’Union européenne concernant un litige portant sur l’exploitation de machines à sous en Finlande.

Ce litige oppose Monsieur Läärä et le procureur du district de Jyväskylä car Monsieur Läärä exploite des machines à sous sur le territoire finlandais sans autorisation.

Le procureur se base sur la loi nationale sur les jeux de hasard. Cette loi indique que les jeux de hasard sont autorisés dans le cadre d’œuvres de bienfaisance ou dans un but désintéressé. Ces buts sont prévus par la loi nationale sur les jeux de hasard. Cette loi considère également que les machines à sous sont apparentées aux jeux de hasard. Cependant, l’administration peut autoriser un organisme de droit public à faire fonctionner des machines à sous en contrepartie d’une rémunération pendant une période donnée. La loi prévoit une amende et une peine de prison pouvant aller jusqu’à 6 mois en cas de non-respect.

La question préjudicielle est rédigée comme suit par la cour d’appel de Vaasan :

« L’arrêt rendu par la Cour le 24 mars 1994 dans l’affaire C-275/92, Her Majesty’s Customs and Excise/Gerhart Schindler et Jörg Schindler, doit-il être interprété en ce sens qu’il est possible de considérer qu’il se rapporte à une affaire analogue à la présente (voir l’arrêt rendu le 6 octobre 1982 dans l’affaire 283/81, Srl Cilfit et Lanificio di Gavardo SpA/Ministère de la Santé) et que les dispositions du traité CE doivent être interprétées ici de la même façon que dans l’affaire précitée ? 

Si la réponse à la première question s’avère négative, en tout ou en partie, le hovioikeus pose les questions suivantes:

Les dispositions du traité CE relatives à la libre circulation des biens et des services (articles 30, 59 et 60) s’appliquent-elles aussi aux machines à sous du type de celles en cause ici?

En cas de réponse affirmative à la deuxième question les articles 30, 59 ou 60, ou tout autre article du traité CE, font-ils obstacle à ce que la Finlande limite le droit de gérer des machines à sous au monopole de la Raha-automaattiyhdistys (association de droit public pour la gestion des machines à sous) et cela indépendamment du fait que la restriction s’applique en vertu de la même loi aux organisateurs de jeux tant nationaux qu’étrangers et cette restriction est-elle susceptible d’être justifiée, eu égard aux motifs exposés dans la loi sur les jeux de hasard, ou dans ses mesures d’application, ou pour d’autres motifs, par les principes contenus aux articles 36 ou 56 ou à tout autre article du traité CE; par ailleurs, le montant du gain susceptible d’être procuré par les machines à sous et son origine, selon qu’il est dû au hasard ou à l’habileté du joueur, influent-ils sur la réponse à cette question ? »

Autrement dit, la cour d’appel se demande si les articles 30, 59 et 60 du TCEE sont applicables dans le cas où une autorité publique habilite un organisme public à exercer un monopole pour exploiter des machines à sous et donc si l’arrêt Läärä peut être interprété dans le même sens que l’arrêt Schindler.

La Cour de l’Union européenne a conclu que l’arrêt en question pouvait bien être interprété de manière analogue à l’arrêt Schindler car ils présentent des caractéristiques semblables. La Cour considère que la législation est justifiée. Les autorités nationales peuvent décider de mettre en œuvre des mesures plus ou moins intense afin de protéger les joueurs et l’ordre social.

Cependant, le flou existant autour de l’importation des machines à sous ne permet pas à la Cour de déterminer si l’article 30 du TCEE est applicable dans le cas d’espèce. L’article 30 TCEE prévoit que « les restrictions quantitatives à l’importation, ainsi que toutes mesures d’effet équivalent sont interdites entre les Etats membres (…) ». L’article 59, tout comme dans l’arrêt Schindler, est applicable car il concerne la libre prestation de services. La mesure restrictive établie par la loi n’est en aucune manière discriminatoire selon la nationalité mais constitue un obstacle à la libre prestation de services. Ces mesures sont justifiées par des raisons impérieuses d’intérêt général et répondent au principe de proportionnalité et de nécessité.

Références

[37] Fédération turque de football

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